Héméra : des lieux et services pour entreprendre
Dans le paysage de plus en plus foisonnant de l’accompagnement des startups, les incubateurs et accélérateurs se multiplient et ne se ressemblent pas ! Parce que se faire accompagner est l’un des facteurs clés de succès pour la réussite d’une startup, nous avons décidé de partir à la rencontre des structures d’accompagnement régionales pour aider les entrepreneurs à s’y retrouver. Aujourd’hui, nous échangeons avec Grégory Lefort, cofondateur d’Héméra !
Bonjour Greg, peux-tu nous présenter Héméra ?
Grégory Lefort : « Nous définissons aujourd’hui Héméra comme une communauté créée par des entrepreneurs, pour des entrepreneurs. Notre but, c’est de soutenir l’innovation. Et pour cela, nous créons des lieux et des services pour entreprendre.
Les lieux sont au nombre de trois : la Halle Héméra, l’Hôtel Fenwick et le dernier lieu que nous avons commencé à exploiter l’année dernière, Héméra Ravezies. Nous avons rénové un tiers du lieu l’année dernière, accueilli de nouveaux coworkers comme Luos et les deux tiers qui restent seront rénovés d’ici fin mars. Ce dernier deviendra notre lieu le plus important en termes de capacité d’accueil avec 250 postes.
Concernant les services, ils sont tournés autour de la logique d’innovation et des startups. Il y a deux grands volets, internes et externes. Côté interne, il y a l’accélérateur qui est à la base de notre business initial et sur lequel nous sommes toujours fiers d’accompagner de super startups. Trois d’entre elles ont réalisé une levée de fonds en 2020 : Obvy, LegalVision et Lucine. Côté externe, nous proposons des services dédiés aux PME ambitieuses de la région qui viennent nous rencontrer pour les aider dans leur stratégie d’open innovation, de sourcing de startups et, de plus en plus, d’investissement au capital de ces entreprises. »
Est-ce que tu peux nous expliquer la philosophie de l’accompagnement que vous proposez aux startups ?
« Là-dessus, nous n’avons jamais dévié de notre idée première. Nous accueillons des projets qui répondent à trois critères. Une équipe à plein temps sur le projet, un produit ou un MVP (Minimum Viable Product) en place et, surtout, un début de commercialisation. Nous recherchons des startups qui ont commencé à se frotter à leur marché et qui ont déjà eu des retours de leurs clients potentiels. C’est à cette étape, généralement en pré-amorçage, que notre valeur ajoutée en tant qu’accélérateur est la plus forte.
En conséquence, nous refusons assez fréquemment des projets qui sont trop peu matures, que nous redirigeons vers des incubateurs. En revanche, nous n’avons pas de préférence sectorielle. Au stade où nous accueillons des sociétés, l’équipe est l’élément clef. Nous avons aussi un passé d’entrepreneurs qui nous permet de nous forger une conviction sur chaque marché et sur le potentiel de chaque startup. L’un des points importants de l’accompagnement, c’est que nous n’organisons pas de promotions, c’est-à-dire que nous ne mettons pas X startups en même temps dans le programme, car chacune est différente dans ses besoins, ses ambitions et sa culture. Nous avons un principe fort qui est d’être toujours en veille, de pouvoir accueillir une startup dès lors qu’on la rencontre et qu’elle nous plaît. Et nous n’avons pas de stress par rapport au fait de ne pas en recruter pendant un certain temps. Chaque startup bénéficie d’un programme dédié avec un mentor dédié, sans masterclass ni consultant. Le mentorat est assuré par des entrepreneurs expérimentés qui redonnent l’expérience qu’ils ont accumulée.
Pour chaque startup, nous effectuons un audit et fixons les objectifs de l’accélération avec leurs dirigeants en établissant une stratégie de pilotage, le go-to-market, la recherche des talents, etc. Et ensuite, l’accompagnement est réalisé uniquement par des entrepreneurs d’expérience.
Nous n’avons pas forcément l’objectif de mener les entreprises que l’on accélère à la levée, car ce n’est pas une fin en soi. Ce que l’on cherche, c’est surtout de leur permettre de trouver un business model, une façon de croître et de se développer. Si ça passe par une levée de fonds, alors c’est leur décision ! Et d’ailleurs, tu lèves généralement mieux dès lors que tu as trouvé un business model qui fonctionne ou une méthode d’acquisition vertueuse. Mais il est vrai que dans les 6 à 12 mois après l’entrée chez nous, nos entreprises se posent la question de lever des fonds et nous sommes aussi là pour les accompagner. »
Comment se matérialise ce rôle de mentor ?
« Nous avons tous une expérience d’entrepreneur. Nous avons créé des startups, certaines ont réussi, d’autres ont échoué, mais nous avons surtout engrangé une expérience massive de l’entrepreneuriat, faite de résilience, de pivots, de réseaux et de méthodes. Le long du chemin, nous avons rencontré d’autres personnes de notre milieu qui ont fait la même chose que nous. Ce groupe, venant d’horizons divers, avec des compétences complémentaires, créé par des passionnés de l’entrepreneuriat s’est rassemblé et est soudé autour du projet Héméra.
Lorsqu’une startup arrive, l’un des mentors s’engage vis-à-vis du groupe et de la marque Héméra à suivre cette startup. Si nous n’avons pas de mentor qui s’y intéresse, c’est que soit nous n’avons pas les compétences, soit nous n’avons pas le temps.
Héméra, c’est ça. C’est une communauté composée d’entrepreneurs et dans laquelle chacun va, au coup par coup et en fonction de son affinité, prendre une startup sous son aile et s’engager à passer du temps avec et à lui transmettre son expérience. L’entrepreneur va aussi jouer un rôle de hub entre cette startup et les autres mentors Héméra. C’est assez simple et basé sur du bon sens. C’est un engagement collectif autant qu’un engagement personnel. C’est hyper opérationnel, nos mentors sont à la fois bienveillants et radicaux.
Toute l’idée c’est de faire du sur-mesure. Si une startup vient nous solliciter, dans la deep-tech par exemple, et que nous n’avons pas de mentor qui connaisse le milieu, nous ne pourrons pas l’aider. Donc nous serons désolés, mais nous passerons sur l’opportunité. Nous ne sommes pas « drivés » par le chiffre. Nous voulons éviter de créer des déceptions ou de faire perdre du temps à des fondateurs.trices. »
Vous accompagnez combien de startups aujourd’hui ?
« Nous en avons accompagné beaucoup. Aujourd’hui, en accompagnement actif, nous travaillons avec 15 startups. Nous avons accueilli quelques belles pépites récemment ; je pense par exemple à Ooviz, Tyloft, Expateo ou NotreAccord. Il faut savoir que l’accélération chez Héméra n’a pas de durée définie. C’est une étape qui enrichit un réseau dans lequel nos entrepreneur.e.s restent, soit parce qu’Héméra siège à leur conseil d’administration, soit en tant qu’Alumni du réseau, avec beaucoup de moments de rencontres. La relation mentor-startup perdure dans le temps aussi. C’est l’intérêt d’un accompagnement personnalisé. »
Et c’est ainsi qu’il y a des entrepreneurs qui ont été accompagnés par Héméra, qui deviennent mentor ?
« Exactement, et c’est notre plus grosse fierté. Un entrepreneur ou une entrepreneuse qu’on a accompagné.e qui nous rejoint ensuite pour redonner sa connaissance et son expérience à des plus jeunes, ça c’est génial. Forcément, cela prend un peu de temps de « sortir du bois », de faire ses armes… Mais effectivement, c’est souvent les plus anciennes startups que nous avons accompagné qui viennent maintenant à nos côtés. »
Est-ce que vous entrez au capital de chacune des startups que vous accompagnez ?
« Nous, nous avons comme principe d’aligner les intérêts. La meilleure manière d’y arriver, c’est de ne pas faire payer les services mais plutôt de prendre une part minime au capital des sociétés à qui nous apportons de la valeur. Nous demandons 5% des parts fondateurs aux startups qu’on accélère.
En contrepartie, les startups reçoivent un temps dédié et sur-mesure très conséquent des mentors. Ces startups accèdent également aux réseaux business et d’investisseurs, mais aussi à des services pré-négociés, voire gratuits. Ils accèdent également à des modèles et des ressources utilisables rapidement pour gagner du temps, et surtout ils peuvent jouir de nos lieux, qui sont assez prisés, pour leurs réunions ou leurs évènements. Tout cela est inclus dans la contrepartie.
Quand le contexte le permet et si les startups le souhaitent, Héméra participe ensuite en tant qu’investisseur intermédiaire au tour d’amorçage qui a lieu quelques mois après, toujours aux côtés d’autres fonds ou de business angels, et au prix du tour bien sûr. Aujourd’hui, nous avons à la fois un pouvoir certain d’investissement et de conviction vis-à-vis des fonds. »
2020 était une année très particulière, qui a vu naître des opportunités, comme des menaces. Comment as-tu perçu cette année, comment l’as-tu vécue ?
« Après un big-bang au printemps 2020, synonyme de sidération pour tous, autant mentors que startups, nous nous sommes vites relevés les manches. L’activité s’est ralentie sur certains secteurs, mais l’argent est toujours là, et les bons projets aussi. Quand on est investisseur ou accompagnateur on investit sur une perspective long terme. Les startups de notre portefeuille se portent majoritairement bien.
Une de nos startups ne s’est pas relevée, car elle était positionnée sur un secteur hyper impacté, et malheureusement pour elle l’aventure s’est finie avec le COVID. Mais l’entrepreneur est déjà reparti sur un autre projet. En regard, Lucine a réussi une belle levée de fonds à 5,5 M€ en fin d’année dernière, et nous étions les premiers investisseurs dans cette société. Cela prouve que nous avions un peu l’œil à l’époque. LegalVision a également poursuivi un très beau parcours, avec une nouvelle levée de fonds, et l’équipe nous a aussi fait confiance au tout début de leur aventure. Obvy a aussi levé des fonds à une date symbolique, c’était le 30 mars 2020 ! Bravo à eux d’avoir été capable de lever alors que la France commençait à se confiner pour la première fois. Je pense qu’ils devraient faire un nouveau beau tour de table cette année.
Nous avons enfin des entreprises comme Archidvisor ou KAZoART qui ont très bien tiré leur épingle du jeu parce que leur secteur se digitalise et que le COVID a accéléré cette transformation. Donc concrètement, oui, c’était une année très particulière. Nous avons abordé nos relations avec les entrepreneur.e.s et l’accélération de manière un peu différente. Nous avons été en soutien, sans se cacher des difficultés. Nous avons utilisé nos réseaux pour aider chaque startup. Enfin, ce que l’on a proposé et que nous ne faisions pas avant, c’est de mettre notre portefeuille en cohorte. Ces moments d’échanges groupés ont beaucoup aidé à déstresser la situation et à trouver des solutions ensemble.
Pour résumer, oui c’est la crise mais tout ne va pas si mal. Il y a des transformations qu’il faut saisir. De nouveaux modèles émergent. Les entrepreneur.e.s sont généralement des personnes résilientes qui ont la capacité de prendre des risques. Qui sont aussi capables d’identifier une situation un peu particulière, comme celle que l’on vit actuellement, comme étant une opportunité. »
Et du coup, quels sont vos objectifs pour 2021 et pour les prochaines années ?
« Côté lieu de coworking, il y aura de nouveaux projets. Nous regardons comment développer cette partie de notre activité. Nous allons capitaliser sur le succès de nos 3 lieux après avoir compris ce dont les coworkers ont besoin et nous allons certainement continuer à décliner notre modèle dans différentes villes. En Nouvelle-Aquitaine, il y a de belles opportunités pour créer des lieux iconiques que l’on peut exploiter.
Côté accélérateur, nous continuons sur notre lancée. Notre conviction de mentorat est toujours là. Nous avons d’ailleurs quelques beaux projets qui rentrent en ce moment. S’il y a des startups ambitieuses qui souhaitent notre expertise ou notre aide, nous sommes toujours preneurs de dossiers en croissance. Nous travaillons également à renforcer notre capacité à investir au capital des startups dès cette année pour être en mesure de faire 5 ou 6 investissements par an, en Seed et en Série A.
Enfin, côté conseil corporate, nous sommes sollicités pour en faire plus. Nous sommes au rendez-vous et développons cette partie de l’activité d’Héméra, complètement en synergie avec les autres lignes de la marque. Les TPE, les PME ou les groupes un peu plus établis viennent nous voir pour notre compétence. Ils nous sollicitent afin de les aider à travailler avec des startups. Nous identifions avec eux des thèmes de recherche, en fonction de leurs métiers ou de leurs besoins et nous lançons des campagnes de sourcing.
Deux modèles sont possibles, soit de la co-accélération, ce qu’on a déjà opéré pour des sociétés bien connues à Bordeaux, soit des POCs, soit de l’assistance à la mise en place de fonds de Corporate Venture. Par exemple, à Bordeaux, nous accompagnons le nouveau fonds RésiliAnce. Nous gérons avec leur équipe le sourcing, le deal flow et nous accompagnons les dues-diligences lors des investissements. RésiliAnce vient notamment d’annoncer un co-investissement avec Kima et Newfund dans HD Rain, une société qui propose de la data de météo de précision.
Nous avons aujourd’hui des demandes de dirigeants de PME qui souhaitent investir, soit via des fonds de Family Office, soit via des véhicules type CVC. Nous les orientons et les aidons, soit à opérer l’investissement, soit à trouver les pépites. »
Un dernier mot pour conclure ?
« Nous sommes ravis de participer à l’écosystème de La French Tech. Nous pensons qu’il y a encore beaucoup de projets que l’on peut mener avec La French Tech Bordeaux. Nous voyons aujourd’hui que toute l’économie traditionnelle est en train d’être bousculée et a besoin de trouver de nouvelles idées, de nouvelles façons d’innover et de s’en sortir. Et nous sommes prêts à relever le défi avec La French Tech et son écosystème. »
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